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  • Photo du rédacteurPierre Lebriquir

L'audience dans Anatomie d'une chute est-elle réaliste ?

(spoilers potentiels)


C'est la question à 100.000 dollars : le procès d'assises est-il réaliste?


Certains aspects sont plutôt bien mis en avant. L'audience est filmée dans la cour d'assises de Saintes alors qu'elle est censée avoir lieu à Grenoble, mais ce n'est pas très grave. La disposition globale des lieux apparaît conforme, avec l'avocat général a la bonne place (du moins au début!) et les trois avocats de la défense également bien placés (notons que sur ces trois avocats, seuls deux prennent la parole, mais bon). L'ambiance est bien retranscrite, avec de la tension, l'importance de l'oralité.


En revanche, que de coupes, d'oublis et de déformations !


Le procès n'est pas filmé du début à la fin. Nous n'assistons pas au tirage au sort des jurés, ne voyons que quelques auditions, pas toutes, que quelques expertises, et il manque notamment les expertises psychologique et psychiatrique, qui sont pourtant très importantes sur la personnalité de l'accusé(e). Nous ne voyons pas non plus les réquisitions de l'avocat général, ni les plaidoiries.


Et les oublis ! Où sont les victimes? Les proches de la victime?


Et les déformations !


Quel avocat accepterait un avocat général aussi agressif, qui va tourner autour des témoins, et qui dirige les débats?


Quel avocat accepterait une présidente aussi partiale, qui s'agace dès qu'on pose une question? Et qui ne dirige rien?


Quel avocat accepterait un tel dossier alors qu'il est si proche de l'accusée?


Quel(le) président(e) accepterait ces audiences où chacun prend la parole librement, sans se lever, sans aucune formule de politesse?


Quel gendarme se présenterait en pull? (c'est le plus grave)


Prenons encore un exemple.


Daniel, l'enfant, est auditionné une première fois.


Puis, la présidente demande à le voir pour lui suggérer fortement de ne pas assister à l'audience. Comment? Elle souhaite lui interdire d'assister à une audience publique? Il y a ici une contradiction profonde.


Puis, sans que l'on comprenne trop pourquoi, elle décide de le réentendre (alors qu'elle ne voulait pas qu'elle assiste à la suite du procès, rappelons-le), sans que cette décision ne soit soumise à un débat contradictoire entre les parties. Nouvelle contradiction et erreur procédurale.


Et l'enfant est réentendu, juste avant les réquisitions et plaidoiries, ce qui est extrêmement important pour peser sur l'avis de la cour. Et après ce témoignage nouveau et essentiel (où je me suis dit que l'acquittement était gagné), l'avocat général ne se manifeste pas? Il passe la moitié du film à râler sur tout le monde en disant que les déclarations sont imprécises, nouvelles et peu justifiées, et là vous avez un témoignage nouveau, qui arrive en fin de procès, sur lequel il ne réagit pas.


France culture parlait, je crois, des "approximations utiles". Il y a une part. Nous sommes dans un film et non pas un documentaire. Ces "approximations utiles" nous permettent de maintenir un équilibre, un doute sur la culpabilité de l'accusée, qui aurait pu être levé plus rapidement ou de manière plus tranchée dans un véritable procès.


C'est ce qui fait la beauté du film.

Alors, l'accusée a-t-elle commis les faits qui lui sont reprochés?


Même s'il y a une vérité judiciaire, seul le chien connaît la vérité...

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